*le souffle & le sol
nous voici à rouen, cuvette de pluie et ville du vent. le souffle qui porte la compagnie lapac continue de battre les ailes de son élan, l’air normand dans le dos et revient naturellement vers sa rive natale. voilà combien de jours, voilà combien de nuits, que nous vous bassinons avec ce rêve d’école, ce rêve qui avec vous deviendrait réaliste. car au fond, faire du théâtre, s’il est vu par et fait avec les autres, n’est-ce pas rendre faisables les rêves, sinon, à quoi bon. nous affirmons, de + en +, qu’il nous est impossible de se cantonner dans la boîte, griffonner des spectacles en huis-clos, harponner un public captif pour détenir l’impression illusoire que ces produits confidentiels plaisent à des inconnus et servent quelque grand propos. non. la pac fabrique avec sa marque et avec les autres. elle se rélève d’indescriptibles déceptions
du passé et rebondit avec résilience vers la prochaine aventure du futur. c’est le souffle, le souffle qui nous transporte, et s’il vient à nous manquer, ne doit pas tourner court. le souffle de la parole, de la permanence, de la promesse. pour charrier ce souffle, il nous faut un sol, là où garer nos imaginaires, plier nos ailes et accrocher nos k-ways. ce qu’on appelle en américain le common ground, à la fois une base
technique et un socle de repères, un lieu commun et un espace d’ancrage. ce sol revêt plusieurs matières, s’exporte dehors et s’adapte en intérieur. ce sol, c’est le plancher. l’ancrage sur le plancher rend propice la cultivation du verbe et l’épanouissement de la vertu. c’est le travail de la parole notre devoir premier, notre terreau et notre horizon. comment la recevoir, la donner, la dire, l’écrire, la transmettre, la restituer. notre projet artistique et humain se noue autour de cet engagement initial : la beauté et le but de l’énonciation adressée, technique, littéraire, documentaire et performative. c’est la pierre angulaire qui nous donne un angle de collection de tous les autres
cailloux. le pain que nous avons que sur la planche, où sans cesse nous remettons nos certitudes à l’établi pour polisser notre pratique et cultiver notre esprit. la planche mixte de la convivialité et de la joie de prolonger la répétition au bistrot de l’école.
plancher, se pencher, craquer les planches sous nos pieds d’hermès légers. car nous venons avec une bonne nouvelle, et nous sommes les messagers.
louise emö